Entretien avec Maria Jesus Alonso Lormand, Directrice du Service de la solidarité internationale | Juillet 2012

Juillet 2012

 

Maria Jesus Alonso Lormand dirige depuis 2006 le service de la solidarité internationale du canton de Genève. A la tête d'une équipe de 6 personnes, elle nous parle de son travail, des priorités de son service ainsi que des projets soutenus.

Pouvez-vous nous donner des exemples concrets de projets soutenus par votre Service?

En 2011 nous avons commencé un projet d'appui aux victimes de violences sexuelles au Rwanda. Ce projet, mis en place avec les Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) et le service de consultation psychologique de Kigali, comporte la prise en charge psychologique des victimes, la mise en place de groupes d'entraide, le développement d'activités agricoles génératrices de revenus et le renforcement des capacités de professionnels rwandais en santé mentale.

En Colombie, un projet de prévention et de lutte contre les violences et les discriminations faites aux femmes a été soutenu dans la municipalité d'Inza dans le département de Cauca. Ce projet est réalisé par l'association Protierradentro.

En Afghanistan, le service a soutenu le projet de l'International Assistance Mission, qui développe un réseau de soins ophtalmiques afin d'éradiquer la cécité guérissable.

Des projets d'aide humanitaire ont été soutenus en 2011, en Haïti, pour faire face à l'épidémie de choléra, et dans la Corne de l'Afrique, suite à la grave crise alimentaire causée par la sécheresse.

Ce sont quelques exemples parmi la centaine de projets soutenus par le service de la solidarité internationale en 2011. Des projets dans les domaines de l'éducation, la santé, les droits humains, l'environnement ou l'aide humanitaire et qui servent également à renforcer le réseau associatif genevois. Le canton de Genève montre ainsi son engagement contre les inégalités et sa politique en faveur de la solidarité internationale.

Comment suivez-vous la mise en œuvre des projets soutenus? Vous déplacez-vous sur le terrain?

Les associations doivent fournir, une fois par année, un rapport d'activités (rapport opérationnel) et un rapport financier des dépenses du projet. Une réunion de travail est tenue après la réception des rapports. Ce n'est qu'après l'approbation du rapport qu'un versement est fait pour la suite des activités.

Une fois par année, des missions d'évaluation se font sur le terrain. Certaines de ces missions sont confiées à des consultants externes, d'autres visites sont faites par les collaborateurs ou collaboratrices du service.

En 2011, je suis allée moi-même en Haïti pour faire le suivi des projets financés par le canton depuis le séisme de 2010. Cela reste le meilleur moyen de voir comment les projets fonctionnent, de vérifier leur pertinence et la capacité de gestion des associations.

Parlez-nous de cette priorité accordée au domaine de l'environnement: quels sont les projets soutenus et pourquoi?

Le Conseil d'Etat a fait de l'environnement un des axes stratégiques de son programme de législature 2010-2013. Le canton alloue chaque année un montant spécifique à la solidarité internationale pour des projets visant la protection de l'environnement - en réponse aux conséquences du changement climatique- la sécurité alimentaire ou la réduction des risques de catastrophes naturelles.

Pour citer quelques exemples, on peut parler de projets de reboisement en arbres fruitiers et forestiers au Nord du Togo pour lutter contre la famine et  la désertification; un projet de récupération des huiles de cuisines usagées dans les hôtels et restaurants de Bali, ou la mise en place d'un réseau de gestion de déchets dans quatre villes de Bolivie

Quelles conditions une association doit-elle remplir pour pouvoir déposer une demande de subventionnement auprès de votre Service?

Les associations installées dans le canton de Genève et qui peuvent justifier d'une activité régulière dans le canton, qui peuvent offrir des garanties relatives à la gestion du projet et à la transparence en matière de sources de financement, de rapport d'activités et de comptabilité.

Pour les projets d'aide humanitaire et d'environnement, les associations installées dans les autres cantons suisses peuvent solliciter des fonds, pour autant qu'ils respectent les critères précédents.

Genève est le siège de nombreuses organisations internationales. Ces dernières peuvent-elles s'adresser à vous?

Les organismes internationaux basés à Genève peuvent également présenter des projets dans leurs domaines d'intervention. Nous travaillons avec différents organismes internationaux, concrètement pour l'aide humanitaire. Une convention destine une partie du fonds de la solidarité internationale au CICR, organisme humanitaire par excellence.

Quel type de collaborations entretenez-vous avec les différents organisations internationales et non-gouvernementales basées à Genève? Avez-vous des exemples concrets à partager?

Comme mentionné, on rencontre toutes les associations une fois par année. Avec les grands partenaires comme la Fédération Genevoise de Coopération, les réunions annuelles avec les bailleurs de fonds permettent de réfléchir aux stratégies de la coopération dans le cadre actuel.

Un autre type de collaboration concerne les actions ou manifestations de sensibilisation ou information. La présence de ces organisations à côté du service, permet d'élargir la vision et de confronter les réalités de terrain avec celle des bailleurs de fonds.

La présence du service de la solidarité internationale avec les organisations non gouvernementales basées à Genève lors du Festival de développement durable est un bon exemple de collaboration.

Le Service de la Solidarité internationale apporte une aide - sous forme de contribution aux frais de location des bureaux - aux missions diplomatiques des pays les moins avancés (PMA) installées à Genève. Pourquoi est-ce important?

La volonté politique de la Confédération et du Conseil d'Etat genevois est de permettre aux pays les moins avancés (PMA) d'avoir une représentation à Genève auprès des organisations internationales.

Il est important que ces pays puissent avoir accès aux organismes des Nations Unies et qu'ils puissent participer aux activités et aux débats qui se déroulent à Genève. Il est à noter que la subvention accordée est destinée au loyer des missions permanentes auprès de l'ONU à Genève, à l'exclusion des ambassades ou des consulats.

Actuellement, les Nations Unies déclarent 48 PMA dont 40 sont présents à Genève.

Parlez-nous de votre parcours. Qu'est-ce qui vous a amenée à travailler sur ces questions?

Depuis très jeune, j'ai été très sensible aux problèmes des inégalités dans un sens large. Je suis née en Espagne, d'une famille modeste, mais qui m'a permis de réaliser des études universitaires. Je suis partie pour la première fois en 1985 au Guatemala avec Médecins sans Frontières et j'ai compris que je voulais travailler dans ce domaine. Pendant plus de 20 ans j'ai travaillé pour des projets de développement et d'aide humanitaire en Afrique, en Asie et en Amérique latine avec différentes organisations internationales et non gouvernementales.

Je crois avoir apporté un petit quelque chose à ces populations, mais ce qui est sûr, c'est qu'ils m'ont beaucoup apporté. Je continue maintenant mon engagement, défendant l'idée que nous devons, depuis la Genève internationale et humanitaire, démontrer que, même si parfois les conséquences de problèmes économiques et politiques peuvent nous dépasser, notre solidarité peut contribuer à améliorer la qualité de vie de beaucoup de personnes vivant dans des situations dramatiques. C'est notre responsabilité de les aider.

 

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