L’informatique quantique, une révolution en marche
En 2025, l’Union internationale des télécommunications fête ses 160 ans d'existence. C'est également l'Année internationale de la science et de la technologie quantiques. Nous vous expliquons pourquoi et comment Genève contribue à l'innovation dans le domaine quantique.
Cet article sur les technologies de l'information quantiques est le deuxième d'une série publiée par le Service de la Genève internationale abordant la contribution de l'UIT aux grands défis mondiaux, au sein d'une ville forte d'une longue tradition de coopération multilatérale.
Quantique. Vous connaissez sans doute ce terme, mais savez-vous vraiment ce qu'il signifie ? Au sens figuré, l’expression « saut quantique » décrit un progrès soudain qui amène une transformation spectaculaire. Le prochain saut quantique sera sans doute redevable au quantique au sens propre, plus précisément l'informatique quantique.
Alors que l'informatique traditionnelle traite les données sous forme de bits, l'informatique quantique traite et stocke ces données sous forme de « qubits », ou bits quantiques, selon les principes de la mécanique quantique.
Les systèmes quantiques actuels disposent de plusieurs centaines de qubits. Pour utiliser cette technologie dans des applications complexes, il faudrait des millions de qubits et des infrastructures importantes. Or, l'informatique quantique est encore insuffisamment stable pour cela. Des progrès rapides sont toutefois attendus au cours de la prochaine décennie, grâce au grand nombre de projets de recherche menés actuellement à travers le monde.
Les Nations Unies ont déclaré 2025 International Year of Quantum Science and Technology. Cela n’est pas le fruit du hasard : le premier article scientifique sur la mécanique quantique a été publié en 1925, il y a exactement cent ans.
Aujourd’hui, le financement public de la recherche en informatique quantique se monte à 40 milliards de dollars au moins répartis sur 29 pays. À plus modeste échelle, le secteur privé investit aussi des sommes de plus en plus importantes dans le développement de cette technologie.
Pour l'instant, ces fonds sont concentrés dans les domaines de la sécurité nationale et de l'économie. Les secteurs ayant un intérêt particulier pour la technologie quantique sont la finance, les pharmaceutiques, l'énergie, les communications et l'automobile, entre autres.
Promesse ou danger ?
L'informatique quantique sera ce que nous en ferons. Au-delà du battage médiatique, cette technologie a un potentiel extraordinaire pour le bien comme pour le mal. Promet-elle un avenir meilleur ou sera-t-elle la source de nouveaux dangers ? L'informatique quantique pourrait par exemple servir à détecter et réduire les fuites dans les conduites d'eau en zone urbaine. Mais elle pourrait tout aussi facilement servir à créer de nouvelles armes chimiques ou à mener des cyberattaques dévastatrices.
Les stratégies nationales en matière de technologie quantique se focalisent principalement sur la recherche, l'éducation et la formation, les chaînes de valeur et les normes. Alors que certains pays sont déjà engagés dans la course au développement de systèmes informatiques résistants aux attaques des ordinateurs quantiques, d'autres peinent encore à cerner l'impact de cette technologie pour leurs citoyens.
Dans un objectif de contrôle des risques, plusieurs pays ont mis en place des restrictions sur l'exportation d'équipements et de logiciels nécessaires au développement de l'informatique quantique. Cette approche « en cavalier seul » risque de mener à l’émergence de normes concurrentes, ce qui nuirait à long terme à la collaboration et à l'interopérabilité.
Les autorités publiques et les institutions financières sont particulièrement concernées par les cybermenaces liées à l'informatique quantique. Pourtant, cette même technologie pourrait également être source de solutions pour renforcer la cybersécurité.
Dans ce contexte, l'UIT a établi une première norme de base relative à la technologie quantique en 2019. Elle collabore actuellement avec d'autres organismes de normalisation sur l'élaboration de normes de sécurité et d'interopérabilité. Non moins de 300 experts issus de 180 organisations et de 43 pays contribuent à ces initiatives, sous l'égide de l'UIT.
L'UIT a publié 40 normes concernant la distribution de clés quantiques et gère une base de données mondiale des normes quantiques.
Tandis qu'un petit nombre de pays accélère le développement des communications quantiques, des milliards de personnes à travers le monde n'ont toujours pas accès à Internet. Et l'informatique quantique risque de contribuer à une aggravation plutôt qu’à une réduction de cette fracture numérique.
C’est pour cela que l'UIT collabore avec des partenaires autour du monde afin de permettre à tous d’accéder à Internet. L'UIT a ainsi lancé une « Initiative d'investissement dans l'infrastructure numérique », en partenariat avec sept organismes de financement du développement, afin de mobiliser les fonds nécessaires à la réalisation de l'accès universel, soit environ 1 600 milliards de dollars.
Un idéal à l'épreuve du temps : Genève et la coopération multilatéraleÀ l’occasion de l’Année internationale de la science et de la technologie quantiques, Genève met tout en œuvre pour unir les forces de la technologie de l'information quantique à celles de la diplomatie multilatérale, dans le but de réduire la fracture numérique. Sous ce thème, le sommet cherchera à identifier des priorités communes et des partenariats pour répondre à ce défi commun, dans des domaines aussi variés que les systèmes d'alerte précoce en cas de catastrophe naturelle, la réduction des émissions de gaz à effet de serre et le renforcement de la cybersécurité. L'Institut ouvert de technologie quantique (Open Quantum Institute) est un partenaire important du sommet. Basé au Centre européen pour la recherche nucléaire (CERN), l’institut bénéficie du soutien de la banque suisse UBS et de plusieurs partenaires locaux. Cette initiative a été conçue et développée par la fondation GESDA (Geneva Science and Diplomacy Accelerator). L'Open Quantum Institute cherche à promouvoir une collaboration ouverte entre chercheurs et à les sensibiliser aux principaux enjeux du développement durable. Il a aussi pour mission de sensibiliser les pouvoirs publics aux implications de l'informatique quantique pour la prise de décisions et la planification stratégiques. La coopération multilatérale relative aux technologies quantiques est encore à ses débuts. En ce qui concerne le contrôle des risques, prévenir vaut toujours mieux que guérir. C'est aujourd’hui qu'il faut concevoir et développer des solutions quantiques sûres et accessibles pour l’avenir de l'humanité. |
Suivez cette série d'articles signée par l'UIT pour découvrir leurs 160 ans d'histoire, les priorités qui l'animent, et son action pour un avenir numérique pour tous